Saint-Gilles – Des services communaux contre la double journée de travail des femmes

La campagne ROSA plaide avec Gauches Communes pour une collectivisation des tâches domestiques, en luttant pour un réinvestissement dans les services publics, ce qui permettrait de fournir des services accessibles financièrement et de bonne qualité.

Un plan radical d’investissements publics pour 30 nouvelles crèches publiques et la gratuité des cantines scolaires !

Dans le monde entier, nous assistons à une reprise des luttes des femmes : les Millions Women’s March contre Trump, pour le droit à l’avortement en Irlande et en Pologne, contre les féminicides en Amérique latine etc. Avec #Metoo, les femmes ont aujourd’hui brisé le silence pour dénoncer le harcèlement et les violences à leur encontre.

Le 8 mars 2018, des millions de personnes ont déferlé dans les rues de l’Etat espagnol contre la violence contre les femmes : la grève féministe du 8 mars a été sans précédent. Les politiques d’austérité prises aux différents niveaux de pouvoir précarisent les femmes et constituent un terreau pour ces violences.

« Le travail d’une femme n’est jamais fini ». Le dicton réfère au fait que pour la majorité des femmes, et certainement celles qui ont des enfants, leur journée de travail ne se termine pas lorsqu’elles rentrent du travail. Elles ont encore toute une série de choses à faire, mais cette fois-ci de façon non rémunérée.

Devoir inscrire un enfant avant même sa naissance sur une liste d’attente pour une place en crèche, aider aux soins de nos aînés à la maison, les familles, et particulièrement les femmes, sont confrontées à de nombreux problèmes de prise en charge des tâches qui étaient auparavant la responsabilité de la société.

L’austérité et les coupes budgétaires dans les services publics, comme l’enseignement et les soins de santé, pèsent sur les épaules des femmes dont le travail non rémunéré représente 56% du temps de travail total (245 min/jour).

ROSA plaide avec Gauches Communes pour une collectivisation des tâches domestiques, en luttant pour un réinvestissement dans les services publics, ce qui permettrait de fournir des services accessibles financièrement et de bonne qualité.

Un plan radical d’investissements publics dans les écoles, les cantines scolaires, les maisons de repos et les crèches allégerait les tâches familiales et donc la double journée de travail des femmes tout en permettant à celles-ci de trouver un meilleur équilibre entre famille, travail et épanouissement personnel. Il nous faut une politique ancrée sur les besoins de la population, pas sur les limites budgétaires.

Une place dans les crèches communales pour chaque enfant

La population est en augmentation en Région bruxelloise. Celle-ci a également augmentée de 15% entre 2005 et 2015 à Saint-Gilles. Au 1er janvier 2017, la commune comptait un peu plus de 50.000 habitants.

Saint-Gilles est la 6ième commune la plus jeune de Belgique, avec un âge moyen de 35,95 ans et où 20 % de la population a moins de 18 ans. Aujourd’hui il y a un nombre croissant d’enfants et de jeunes. La commune n’est pas préparée à ce défi. Il y a des énormes déficits notamment au niveau des crèches et des écoles.

La majorité communale actuelle a tenu partiellement une de ses promesses électorales de 2012 en élargissant le nombre de places dans les crèches avec la création de 187 places depuis 20131.

Mais le nombre de places d’accueil pour enfants à Saint-Gilles est toujours inférieur à la moyenne régionale et le taux de couverture pour des enfants de moins 3 ans est très bas à Saint-Gilles, avec moins d’une place d’accueil pour 4 enfants (contre la moyenne bruxelloise d’une place pour 3 enfants).

De plus, si l’on tient compte uniquement des places d’accueil pour lesquels les tarifs sont calculés en fonction du revenu des parents, le taux de couverture descend alors à 15% (contre 20% dans la région bruxelloise). Cela signifie qu’il n’y a qu’une place à un tarif plus abordable pour sept enfants.

La majorité communale est bien obligée de reconnaître les pénuries dans ce secteur. Pour continuer à augmenter les capacités d’accueil un maxi projet dans le cadre du contrat de quartier Bosnie va voir le jour sur l’ancien site de l’ECAM.

Ce qui devrait être la plus grande crèche de la région bruxelloise y sera implantée : 3000 m2 et une capacité d’accueil de 149 enfants. Ce projet public a un budget de 16 millions d’euros.

Ces 149 nouvelles places seraient divisées en 11 entités. C’est une avancée, sans malgré tout résorber l’ensemble du déficit. Il faudra aussi augmenter le nombre de crèches sur l’ensemble de la commune pour permettre un accès à une crèche communale près de chez soi.

Nous voulons nous mobiliser pour arracher les millions nécessaires de fonds publics pour 30 nouvelles crèches communales nécessaires à Saint-Gilles.

Cette pénurie permanente des places d’accueil organisées et financées par les autorités publiques a laissé un espace au secteur privé, qui comble en partie le manque mais à un coût élevé. À peu près 45% des places d’accueil à Saint-Gilles sont privées et peuvent coûter jusqu’à 700 euros par mois.

Face à cela, il y a encore la possibilité de se tourner vers les grands-parents, une solution choisie dans 31 % des cas. Mais avec l’augmentation du départ de l’âge à la retraite cette capacité d’accueil va se réduire de manière significative.

Un quart des enfants à Saint-Gilles sont nés dans un ménage sans revenu professionnel.

De plus, pour les deux sexes, le nombre de travailleurs à temps partiel à Saint-Gilles est le plus élevé de la région : 45% des femmes salariées dans la commune travaillent à temps partiel. Le Global Gap Gender Index 2016 indique que les familles monoparentales ont le plus de difficultés financières. Au moins 80% de ces femmes vivent en dessous du seuil de pauvreté et reportent leurs propres soins de santé pour être capable de payer d’abord ceux de leurs enfants.

Même dans les familles biparentales, si les parents n’ont pas réussi à obtenir une place dans une crèche communale, la situation économique oblige bien souvent la femme à rester à la maison pour prendre en charge les enfants, car les coûts élevés jusqu’à 700 euros par mois demandés dans le privé sont souvent hors de leurs moyens.

Des études révèlent que les enfants dans les crèches sont mieux préparés pour l’école par la suite et commencent avec un avantage dans leur parcours éducatif. Même parmi les familles qui réussissent à avoir une place dans une crèche, c’est généralement la personne avec le salaire le moins élevé qui doit adapter son agenda professionnel en fonction des horaires et des jours de fermeture de la crèche.

Avec notamment l’écart salarial qui est toujours d’actualité entre homme et femme, et le plus grand nombre de temps partiel chez les femmes, ce sont dans la plupart des cas celles-ci qui font ce sacrifice.

Gauches communes défend la création de 30 nouvelles crèches communales, soit 600 places d’accueil publiques supplémentaires dans la commune. C’est la condition nécessaire pour que les parents ne doivent plus se tourner vers les crèches privées.

Augmenter le nombre de places d’accueil dans les crèches communales est nécessaire. Mais il faut aussi garantir la qualité du service qui est liée notamment aux conditions de travail du personnel. Nous défendons un statut correct pour les puéricultrices avec des salaires plus élevés et davantage de personnel.

Pour la gratuité des cantines scolaires

Les résultats d’une enquête de Bruzz démontrent qu’à Bruxelles, le nombre d’élèves et d’enseignants qui mangent encore un repas chaud diminue. L’étude nous apprend que les familles dans la pauvreté et en situations socio-économiques précaires ont tendance à consommer moins de légumes et de fruits frais.

L’apport de ces aliments par la prise d’un repas chaud à l’école est donc certainement essentiel pour les enfants issus de ces couches défavorisées de la société.

La qualité des repas (pris en main par la multinationale Sodexo) est insuffisante. A Saint-Gilles des groupes de parents d’élèves ont interpellé le conseil communal au sujet de la qualité des repas dans les écoles communales. La réponse tournait autour de la question du coût.

Comprenez : les besoins et la qualité passent après les budgets et la recherche de rentabilité. Les appels d’offre ont tout de même été quelque peu modifiés et comprennent quelques recommandations minimes sur les menus. Mais ce fonctionnement avec un appel d’offre ne permet pas d’atteindre un changement qualitatif suffisant : les multinationales comme Sodexo peuvent poser candidature et revenir dans les assiettes des enfants.

En tant qu’entreprise privée, Sodexo n’a qu’un objectif : faire du profit. Cela signifie qu’une partie du prix demandé aux parents s’enfuit vers les poches des actionnaires. La multinationale affiche internationalement 745 millions d’euros de profit en 2017.

Les parents se plaignent parce que les repas sont déséquilibrés et trop gras. Beaucoup d’enfants ne reçoivent ainsi pas le repas chaud sain dont ils ont besoin. Or la prise d’un repas chaud quotidien a une grande importance sur la santé de l’enfant et pour l’acquisition précoce d’habitudes alimentaires saines.

Avec la sous-traitance, le personnel des cantines a été remplacé par des travailleurs avec des contrats précaires. De plus, les parents se voient obligés d’assumer une tâche supplémentaire qui pourrait facilement leur être évitée si la distribution des repas dans les écoles était gratuite et proposait des repas sains et de qualité.

Avec le projet sur le site de l’ECAM, la commune prévoit aussi l’installation d’une cuisine centrale pour l’ensemble des crèches de la commune. Pourquoi ne pas élargir cette démarche vers l’ensemble des besoins en repas quotidiens de qualité : les crèches -comme cela est prévu- mais aussi les écoles communales et les maisons de repos.

Un repas chaud dans des écoles primaires de Saint-Gilles coûte 3,20 euros, dans les écoles secondaires les prix sont encore plus élevés. La commune n’intervient pas financièrement. Cela est clairement un choix politique. D’autres communes bruxelloises interviennent financièrement dans les repas scolaires.

Aujourd’hui, il faut tout d’abord assurer des repas chauds de qualité et gratuits dans les écoles communales. Il faut mettre sur pied une cuisine communale à Saint-Gilles dans le but de fournir des repas sains, équilibrés et variés aux crèches, aux personnes âgées qui résident dans les maisons de repos, aux écoles et aux travailleurs communaux locaux.

L’installation d’une cuisine communale à Saint-Gilles offre l’opportunité de répondre aux besoins de la population, des employés et ouvriers communaux mais également de créer des emplois locaux. Il sera d’ailleurs nécessaire de réfléchir ce projet en y associant celui de l’insertion professionnelle.

En effet, les cuisines communales pourraient être un outil pour permettre d’échapper aux contrats précaires qui sont généralement proposés (comme les Article 60).

Les cuisines communales pourraient servir de lieu de stage rémunéré pendant la formation et, en s’associant avec un organisme de formation, offrir une qualification de commis de cuisine dans le but d’offrir des contrats d’emploi décents et stables.

Pour plus de soins accessibles et de qualité pour les personnes âgées

Bien qu’il y ait moins de personnes âgées dans la Région de Bruxelles-Capitale comparativement aux deux autres régions de la Belgique, une plus grande proportion de celles-ci habitent dans une maison de repos. Selon le Kenniscentrum Woonzorg Brussel cela est dû au fait que la plupart des Bruxellois de plus de 65 ans sont défavorisés ou vivent dans une situation de précarité.

Il y a un haut pourcentage de personnes âgées faisant appel au GRAPA (Revenu garanti aux personnes âgées) : 19% à Saint-Gilles contre 11% pour la moyenne régionale.

En plus de cela presque 10% des personnes âgées reçoivent une allocation de subsistance pour personnes handicapées (contre 6 % au niveau régional) et pas moins de 45% des personnes âgées ont droit à une compensation financière pour les coûts des soins de santé.

Cette part non négligeable de personnes âgées qui se trouvent dans une situation très précaire et qui dépendent de nombreuses aides pour survivre permet d’expliquer le fait que l’espérance de vie dans la commune est l’une des plus basse de toute la Région.

Le marché du logement est financièrement peu accessible et les logements ainsi que l’environnement domestique sont inadaptés aux personnes âgées.

A cela s’ajoute l’isolement dans lequel beaucoup de personnes âgées vivent ainsi que la complexité des structures pour l’accueil des personnes ayant des besoins particuliers qui poussent de plus en plus de personnes âgées vers les maisons de repos2.

Les dépenses pour le logement et les soins de santé pèsent très lourds. En moyenne un Bruxellois de plus de 65 ans sur dix déclare reporter les dépenses liées à la santé en raison de difficultés financières. Plus de 15 % trouvent l’aide à domicile inabordable. Cela se ressent encore plus chez les personnes dans une situation socio-économique fragile qui ont plus souvent et plus tôt des problèmes de santé et donc nécessitent des aides à domicile.

Pour les personnes âgées de Saint-Gilles, la commune prévoit, via le CPAS, deux structures d’accueil permanentes : la maison de repos et le séniorie ‘Les Tilleuls/De Linden’. La maison de repos Les Tilleuls a une capacité de 198 lits, la séniorie de 31 flats/studios.

Entre 2013 et 2015 la maison de repos était en rénovation avec pour objectif de prévoir des espaces verts pour les habitants, une amélioration de la sécurité, de meilleures infrastructures et de meilleures conditions de travail pour le personnel.

Des points positifs, mais qui ne répondent pas au besoin croissant de places d’accueil abordables et de qualité pour les plus de 65 ans à Saint-Gilles. En plus de l’augmentation du nombre de places, il est nécessaire d’investir dans plus de personnels, via la réduction collective du temps de travail, des salaires plus hauts pour garantir des services publics de qualité.

De nombreux aides-soignants dans les maisons de repos sont débordés et à la limite du burnout, cela ne leur permet plus d’assurer un service de qualité aux pensionnés.

Le privé profite également de l’incapacité de la commune à répondre à la demande. Les tarifs des maisons de repos privées sont plus élevés pour un service plus faible. Les institutions privées emploient 30 % de personnel en moins afin de maximiser leurs profits, elles se contentent de répondre aux normes minimales imposées par la loi sans se soucier du bien être des pensionnés.

L’accueil des personnes âgées n’est plus vu comme un service nécessaire mais comme un marché. En moyenne, il y a seulement 7 travailleurs dans le privé contre 10 dans une maison de repos du CPAS. Les institutions privées ne tiennent pas compte des besoins pour un accueil de qualité et des conditions de travail décentes et par là économisent sur les frais de personnel et augmentent la rentabilité.

C’est une réalité douloureuse approfondie par les réformes successives des pensions que, lors du départ à la pension, on voit son revenu baisser. La pension moyenne dans la Région de Bruxelles-Capitale est de 1.140 € brut par mois[3]. C’est inférieur à la pension en Flandre ou en Wallonie.

Ce n’est évidemment pas possible avec une pension de 1.140 € brut par mois de payer une chambre dans une maison de repos pour le prix de 1.323,30 € par mois (41,11 €/jour pour un lit dans la résidence Les Tilleuls x 30 jours/mois).

Quand on additionne tous les lits disponibles dans les maisons de repos (publiques et privées) de Saint-Gilles, on dénombre 365 lits. D’un autre côté il y a quelques 4500 personnes de plus de 65 ans dans la commune (9% de la population). Cela veut dire qu’une place en maison de repos n’existe que pour 8% des plus de 65 ans.

Les 92% restant doivent soit compter sur un membre de leur famille qui a les moyens financiers et le temps de prendre soin d’eux, soit alors trouver une place dans une maison de repos dans une autre commune Bruxelloise ou dans la périphérie de la région. Malheureusement certains sont juste laissés à eux-mêmes et doivent se débrouiller seul dans un appartement même quand leur état de santé ne le permet pas.

La commercialisation des soins de santé amène à des plus mauvaises conditions de travail ainsi qu’à un service de plus en plus cher mais de moins bonne qualité.

Il est nécessaire tant pour les personnes âgées que pour les gens qui les encadrent de créer des nouvelles places en maisons de repos gérées par la commune avec des effectifs suffisants.

Pour des investissements massifs dans les services publics

La commune doit d’urgence libérer plus de moyens pour l’accueil à la petite enfance, les écoles et les soins aux personnes âgées. Seul un plan radical d’investissements publics dans tous les services communaux permettra d’atteindre ces objectifs et de répondre aux besoins des habitants.

Cela permettra de rendre les services publics de qualité et abordable et permettra dès lors de s’attaquer à la double journée de travail des femmes.

Contrairement à ce que les partis traditionnels disent, les moyens pour financer cela existent. Le gouvernement Michel et ses prédécesseurs n’hésitent pas à faire des cadeaux aux actionnaires ou à effectuer des dépenses pharaoniques dans des projets sans intérêts pour la majorité (achat d’avions de chasse, sauvetage des banques etc.).

Il faut réclamer l’utilisation de cet argent pour une politique sociale. Malgré tous les scandales successifs, ils continuent à se cacher derrière l’excuse que la marge de manœuvre dans le cadre du budget légal est trop limitée et que, par conséquent, seulement les mesures sociales d’urgence sont autorisées.

Pour réaliser un tel plan d’investissements massifs, la commune doit rejeter ces contraintes budgétaires injustes imposées par la Région et le Fédéral.

Plus d’informations sur Gauches Communes

Notes :

1 Brochure Info Saint-Gilles n° 53, Saint-Gilles en chiffres.
2 http://www.kenniscentrumwwz.be/brusselse-ouderen-cijfers
3 http://www.woonzorgbrussel.be/brusselse-oudere


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