La confiance renforcée par les scores électoraux du Vlaams Belang, le cercle étudiant catholique d’extrême droite KVHV (Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond) a utilisé les locaux de l’université de Gand pour y faire résonner le sexisme le plus immonde lors d’une conférence avec le chirurgien Jeff Hoeyberghs, un sexiste notoire. Peut-être avez-vous vu la vidéo que nous avons réalisée à ce sujet et qui est devenue virale sur le net ? Deux actions ont également été organisées par la Campagne ROSA et les Etudiants de Gauche Actifs. Grâce à cela, un débat plus large a eu lieu concernant le sexisme, de plus la confiance en soi de l’extrême droite a reçu une claque.
L’extrême droite ressent une confiance mal placée
La confiance renouvelée de l’extrême droite a entrainé des incidents tels que l’agression de jeunes militants pour le climat au festival Pukkelpop l’été dernier, le salut nazi de ce membre des jeunesses du Vlaams Belang au fort de Breendonk ou encore l’incendie du futur centre d’asile de Bilzen.
Les scores électoraux du Vlaams Belang s’expliquent avant tout par un sentiment anti-establishment. La majorité de la population est fatiguée de la politique antisociale des partis traditionnels. Les électeurs du VB ne sont généralement pas attirés par ce parti pour son racisme, son sexisme et son homophobie : ils sont piégés par son discours faussement anti-élite. Tout cela n’est pourtant que de la poudre aux yeux : au Parlement, le VB vote systématiquement en faveur des chefs d’entreprise et des actionnaires.
Le KVHV Gand tente de rendre le sexisme acceptable
A Gand, le cercle étudiant conservateur KVHV a estimé qu’il pouvait profiter de l’aubaine, tout d’abord en invitant le dirigeant du groupe néonazi Schield & Vrienden, Dries Van Langenhove, à participer à un meeting. Mais cette initiative a été interdite par le conseil universitaire qui craignait les protestations antifascistes. Le 4 décembre, le KVHV est reparti à l’offensive en invitant le sexiste Jeff Hoeyberghs pour une conférence en en faisant la promotion à l’aide des déclarations les plus abominables du personnage. Ce cercle étudiant n’en est pas à son coup d’essai, il a d’ailleurs servi de matrice à Schield & Vrienden, dont sont issues les figures de proue. Le KVHV a notamment déjà invité David Duke, ancien grand sorcier du KKK.
La Campagne ROSA riposte
L’une des tâches de la gauche est de systématiquement confronter l’extrême droite à son manque de soutien réel dans la société, en mobilisant la plus grande contre-mobilisation possible. La Campagne ROSA et EGA ont organisé une action lors de la conférence de Jeff Hoeyberghs en réunissant 70 personnes en moins de 48 heures. Nous avons exigé que l’université ne donne pas de tribune à ce genre de discours misogyne. Le KVHV reçoit des subsides de l’université et peut bénéficier de son infrastructure puisqu’il est officiellement reconnu comme cercle étudiant. Cet argent serait bien mieux utilisé pour lutter contre la haine et les discriminations et servir ainsi à une majorité d’étudiants.
Très fier de son meeting, le KVHV a mis une vidéo en ligne. Jeff Hoeyberghs est venu faire très exactement ce pour quoi il avait été invité. Mais ses déclarations (‘‘les femmes veulent les privilèges des hommes mais refusent d’ouvrir les jambes’’, etc.) ne sont pas qu’une tentative de chercher de l’attention. C’est un symptôme du sexisme structurel profondément enraciné dans cette société. Le sexisme est une réalité quotidienne, tant en paroles qu’en actes. Nous avons compilé les moments les plus terriblement sexistes, racistes et homophobes du meeting dans notre propre vidéo, en appelant immédiatement les étudiants à s’organiser pour forcer l’université à agir.
Le KVHV et son orateur se sont réfugiés derrière la libre expression. Leurs propos sont inacceptables : ils banalisent l’image de la femme en tant que vulgaire objet et qu’être humain de second ordre. C’est sur cette base idéologique que prolifèrent les phénomènes sociaux tels que la violence envers les femmes et la culture du viol. Selon une étude de l’UE, en Belgique, plus de 40 % de la population trouverait le viol acceptable ‘‘dans certains cas’’. Heureusement, sous la pression des actions de masse en faveur de l’émancipation des femmes, nous constatons un changement d’opinion dans ce domaine partout dans le monde. Ce qui a été toléré pendant des décennies n’est plus acceptable aujourd’hui.
En un rien de temps, la vidéo est devenue virale. Les versions néerlandaise et française ont été regardées plus de 1,5 million de fois et elles ont été reprises par tous les grands médias des deux côtés de la frontière linguistique. La version française s’est également répandue rapidement en France et au Québec. Cela confirme ce que nous avons écrit plus haut : le sexisme de l’extrême droite ne dispose pas d’un soutien dans la société.
En action !
L’université de Gand a pris ses distances par rapport au meeting et à son contenu, sans toutefois prendre de mesure. Plusieurs associations étudiantes ont exigé l’adoption de sanctions pour le KVHV par l’intermédiaire du PFK (l’organisation faîtière des organisations étudiantes politiques). Le PFK a accepté la proposition la plus modérée : deux mois d’exclusion et des excuses publiques.
Afin de transformer l’indignation en action, nous avons lancé l’appel de venir manifester devant le Conseil exécutif qui est l’organe suprême de l’université, où nous avons exigé l’exclusion du KVHV et l’organisation d’une discussion sur le sexisme dans toute l’institution. Plus de 250 étudiants se sont présentés à 8 heures du matin pour soutenir ces demandes. Cependant, les activistes n’ont pas été autorisés à être présents au Conseil, le sommet de l’université a préféré faire le moins de remous possible.
Les autorités universitaires ont donc décidé de s’en tenir à la sanction excessivement modérée du PFK. Il faut garder en tête que le KVHV a servi de lieu de formation à beaucoup de politiciens qui occupent aujourd’hui des positions importantes, dont Theo Francken et Bart De Wever. L’université n’a probablement pas voulu mettre en péril ses relations avec ces tristes sires. Nous ne pouvons pas compter sur les institutions officielles.
La lutte se poursuit
Les vidéos ont créé un vaste débat social sur le sexisme et la façon de le combattre. Notre vidéo, mais avant tout nos actions, ont permis de donner une claque à l’extrême droite. La Campagne ROSA veut continuer sur cette voie avec un programme concret et des actions combattives. Nous continuerons à intervenir partout et chaque fois que l’extrême droite sera présente. De plus, nous proposerons des solutions sociales et structurelles contre le sexisme. En collaboration avec la CGSP, à Gand, nous menons une campagne pour un salaire minimum de 14 €/h à l’université et ailleurs, nous exigeons que le Conseil d’administration de l’université décide d’investir, entre autres, dans les garderies pour le personnel et les doctorants, dans un conseil psychosocial décent sans liste d’attente (pour les victimes du sexisme et toute autre personne qui en a besoin) et dans des logements décents et accessibles qui peuvent rendre les étudiants indépendants de leurs parents ou de leur partenaire.
· 8 mars : manifestation nationale pour l’émancipation des femmes, 14h, Bruxelles
· 14 mars : Mars contre le sexisme et pour un salaire décent. 15h, Hôtel de ville, Gand.