Voici le cri de millions de femmes qui se mobilisent depuis des mois dans les rues d’Argentine. Cette marée verte très combative exige que « survivre à un avortement ne soit pas un privilège de classe », ce que le Sénat argentin a refusé ce 9 août 2018. En effet, alors que la Chambre des députés l’avaient approuvé en juin dernier, seuls 31 sénateurs contre 38, ont voté pour la légalisation de l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG).
L’avortement n’est complètement légal que dans 3 pays d’Amérique latine, Cuba, Guyane et Uruguay, ainsi que dans la ville de Mexico City et dans le département de la Guyane française. En Argentine, depuis 1921, l’avortement n’est permis qu’en cas de viol et de danger pour la vie de la mère ; et même dans ces deux cas, le médecin peut refuser de vous traiter. Les risques que courent les femmes qui avortent clandestinement sont nombreux, 135 femmes internent des hôpitaux publics chaque jour pour des complications suites aux avortements clandestins, elles risquent également jusqu’à 4 ans de prisons. Et, selon Amnesty International, 3000 femmes seraient mortes dans les 25 dernières années de ces avortements clandestins.
L’Argentine est gouvernée par Mauricio Macri depuis décembre 2015. Macri est membre du parti Propuesta Republicana, parti de droite conservatrice qui fait partie de la coalition Cambiemos. Celle-ci représente la majorité des voix contre l’avortement au Sénat. Macri rêvait, au début de son mandat, de faire de l’Argentine, le « supermarché du monde », cette politique économique de recherche d’investisseurs n’a permis que l’inflation et l’augmentation du nombre de pauvres. Le président a déjà du faire face à 3 grèves générales.
En septembre 2016, il y avait déjà 1,4 millions de nouveaux pauvres alors que Macri n’était au pouvoir que depuis 10 mois. La pauvreté touche à présent 13 millions d’Argentins sur une population de 44 millions, soit 32,9 % de la population. C’est le 25 juin dernier, qu’a eu lieu la plus grande grève générale des trois qu’a connu ce gouvernement et qui a paralysé tout le pays.
La situation des femmes ne s’améliore pas dans cette Argentine qui est en pleine crise économique. Et c’est dans ce contexte économique, également depuis 2015, qu’est né « Ni Una Menos », ce collectif qui a mobilisé des milliers de femmes pour lutter contre le sexisme et qui s’est répandu dans de nombreux pays d’Amérique latine depuis.
Les femmes argentines (ainsi que les chiliennes depuis avril dernier), étudiantes et travailleuses, se mobilisent depuis des mois pour exiger au gouvernement Macri la fin de l’éducation sexiste et le droit à l’avortement légal et gratuit pour toutes. Dans le pays du pape François 1er, l’Eglise a un impact énorme et les femmes refusent de n’être que des objets reproductifs.
Elles exigent de pouvoir avoir accès à une éducation non sexiste, à une santé gratuite, à pouvoir disposer de leur corps comme elles le désirent, à pouvoir décider quand elles veulent avoir des enfants grâce à des contraceptifs gratuits et à pouvoir avorter en toute sécurité sans risquer de mourir ou d’être blessé.
Seule la lutte permettra aux femmes d’obtenir ces droits et de lutter contre le capitalisme qui engendre le sexisme qu’elles vivent au quotidien, sur leurs lieux de travail et dans leurs universités et écoles. Les Argentines ont montré une capacité à se mobiliser de manière incroyable. Ces mobilisations ont fait également écho dans le monde entier puisqu’il y a eu des actions dans une centaine de pays le mercredi 8 août. Le vote négatif du Sénat n’arrêtera pas cette lutte et cela a déjà été démontré par les manifestantes qui se sont directement mobilisées après le vote. Et ce, malgré l’extrême violence qu’elles subissent de la part des « pro-vies » qui les insultent et les frappent depuis des mois.
Dans le cadre du capitalisme, seule la lutte révolutionnaire permettra de garantir des vrais droits et afin de les gagner sur le long terme sans devoir sans cesse avoir peur de les perdre, il faudra casser avec ce système et construire une société réellement égalitaire et sans classe sociale.