Israël. Mobilisations importantes suite à une affaire de viol collectif

Immédiatement après la publication des faits, des manifestations spontanées et massives ont eu lieu dans de nombreuses villes. Le dimanche 23 août, une grève des femmes a pris place (le dimanche étant le premier jour de travail en Israël) et des milliers de personnes ont participé à la grève.

CW: Cet article contient des informations sur un cas de viol/agression sexuelle/violence

Une jeune fille de 16 ans a été victime d’un viol collectif dans la ville d’Eilat, au bord de la mer Rouge (Israël). Elle y passait ses vacances avec des amis. Les auteurs ont profité de son état d’ivresse et auraient fait la file devant sa chambre pour la violer, tandis que d’autres hommes ont filmé les faits ou applaudi. Les faits ont été connus dans les médias le 19 août.

Lorsque la nouvelle a éclaté, elle a provoqué une importante vague de rage au sein de la population israélienne; immédiatement après la publication des faits, des manifestations spontanées et massives ont eu lieu dans de nombreuses villes. Le dimanche 23 août, une grève des femmes a pris place (le dimanche étant le premier jour de travail en Israël) et des milliers de personnes ont participé à la grève.

Hypocritement, certaines entreprises et sociétés internationales ont également participé, alors que certaines d’entre elles ont une part de responsabilité directe dans le harcèlement sexuel qui existe sur leurs propres lieux de travail…

Manifestations de masse et grève des femmes

Des manifestations ont eu lieu du 20 au 23 août et ont duré jusque tard dans la nuit. Plusieurs routes ont été bloquées alors que les manifestant(e)s ont participé à une marche spontanée à Tel-Aviv, ainsi qu’à Haïfa. Il est important de noter que les jeunes et les femmes ont été les plus actifs dans ces initiatives : pour beaucoup, c’était la première fois qu’ils rentraient en lutte.

Au fil des jours, de plus en plus de détails choquants deviennent connus. Il semble que certains amis de la victime soient également impliqués dans le crime, que les faits aient été filmés, que les vidéos puissent être utilisées pour faire du chantage à la victime.

Cependant, la grande vague de réactions et de manifestations a mis beaucoup de pression sur les autorités qui mènent une enquête très active et recherchent les vidéos pour empêcher leur circulation en ligne. En même temps, le mot « Eilat » en hébreu a été recherché un grand nombre de fois sur Pornhub, et cela montre à quel point la violence sexiste est présente dans la société.

La situation en Israël

Ces dernières années, Israël a connu des mouvements fréquents. La crise économique ne cesse de s’aggraver à cause de la crise sanitaire du CoVid19 : le chômage a augmenté, le pouvoir d’achat a diminué, et ce dans un pays où les services publics sont déjà sous-financés. Le pays connaît une récession de plus de 6 %. Et tout cela couplé d’une crise politique très profonde : trois élections consécutives en un an et demi ont abouti à un gouvernement très fragile.

C’est pourquoi la population israélienne est descendue dans les rues en masse dès que ce crime a été connu : surtout les jeunes femmes, enragées, pleines d’énergie, ont inondé les rues de nombreuses villes pour demander justice, mais aussi pour accuser ouvertement le gouvernement et le système politique du manque d’éducation sexuelle dans les écoles, ainsi que de la pénurie de services publics, notamment ceux d’aide et de soutien aux victimes de violences sexuelles.

D’une part, elles accusent l’establishment de promouvoir la culture du viol : l’un des slogans les plus populaires était « La culture du viol commence dans les couloirs du gouvernement ». D’autre part, les manifestants réclament le renforcement et le refinancement des services publics ; par exemple, l’hôpital d’Eilat ne dispose pas d’installations nécessaires pour un traitement d’urgence des victimes de viol. Le système de santé est largement négligé, surtout dans la province du pays.

Stop au victim-blaming et aux violences faites aux femmes !

Une autre exigence des manifestants était des punitions plus sévères pour les auteurs de harcèlement et d’agressions sexuelles. Ils sont également très clairement opposés au victim-blaming qu’a subit la victime, en rappellant que les coupables sont ces hommes qui ont fait la file pour violer une mineure, ont filmé et applaudi un crime horrible.

Des manifestations et autres actions sont encore organisées devant le tribunal qui est en charge de juger ce crime, faisant pression sur le système politique et judiciaire : des inculpations ont déjà été prononcées contre 11 hommes.

En Israël, comme en Belgique et dans tous les pays, l’ensemble du système est coupable de machisme, de violence faite aux femmes, de la culture du viol et du harcèlement. Dans tous les pays, les femmes sont surreprésentées dans les emplois les moins bien payés, sont plus touchées par le chômage et sont les premières à voir leurs conditions de vie se détériorer en raison des coupes budgétaires. En même temps, elles subissent des violences, elles ont du mal à quitter un partenaire violent en raison de contraintes financières ; elles doivent faire face au sexisme et à la culpabilisation, si elles décident de dénoncer un viol ou un harcèlement ; elles sont obligées de se perdre dans un labyrinthe bureaucratique pour voir leur affaire portée devant la justice. Et souvent, elles voient l’auteur des violences qu’elles ont subies s’échapper avec une peine minimale ou même s’en sortir « par manque de preuves ».

La culture du viol

La culture du viol est omniprésente dans nos sociétés. Ce cas précis prouve à quel point les opinions misogynes et sexistes sont présentes et même acceptées : les hommes qui ont participé aux faits à Eliat pensaient que ce qui se passait était ‘normal’, et personne n’a aidé cette fille. C’est ce que pensaient aussi tous ceux qui ont fait la recherche sur le site de Pornhub : la culture du viol est profondément enracinée. Un changement social profond est nécessaire:  nous devons construire une société dans laquelle de tels crimes ne sont pas acceptés, dans laquelle les auteurs ne peuvent pas s’en tirer à bon compte, une société qui condamne solennellement le viol et respecte les femmes.

La seule façon de combattre le sexisme est de mener une lutte organisée pour libérer des fonds pour les services publics tels que la justice, la santé, les services d’aide aux victimes, ainsi que l’éducation sexuelle à tous les niveaux. Nous devons également nous battre pour des emplois de qualité et des salaires décents. En fin de compte, la lutte contre le sexisme est couplée à la lutte pour un changement radical de la société, pour le renversement du système capitaliste.


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ROSA organise des actions, des événements et des campagnes pour combattre le sexisme et le système qui l’entretient : le capitalisme.