Australie: Plébiscite pour le ‘Oui’ mais le combat ne s’arrête pas au mariage pour tous !

Unissons-nous et combattons ce système qui génère l'inégalité ! Le Socialist Party en Australie (la section-sœur du PSL dont la Campagne ROSA est issue) fait campagne pour le plus large vote possible du «Oui» dans le « plébiscite » - un référendum consultatif - sur les droits au mariage pour tous.

Bien qu’un plébiscite ne soit pas le meilleur moyen pour parvenir à l’égalité du mariage, il devrait être utilisé pour envoyer un message fort à tous ceux qui préconisent la discrimination à l’égard des personnes LGBTQI+.

Étant donné que le gouvernement Turnbull s’accroche au pouvoir par un seul siège, l’idée de faire pression pour que le Parlement instaure un vote direct (sans participation de la population) sur la question du mariage pour tous a toujours été très difficile à imaginer. En effet, un vote direct menacerait l’existence même du gouvernement de droite de Malcom Turnbull. Les libéraux ont déjà vu la défection de Cory Bernardi depuis les élections et plusieurs autres députés conservateurs ont menacé de suivre si les modifications apportées à la loi sur le mariage étaient avancées sans que la question soit soumise à un vote public.

Un Gouvernement instable

Du point de vue de Turnbull, ce plébiscite consiste à essayer d’éviter des séparations dommageables chez les libéraux et au sein de la Coalition. Comme l’a fait le Premier ministre Billy Hughes il y a 100 ans avec la question de la conscription, Turnbull essaie d’utiliser un plébiscite pour régler le débat dans ses propres rangs. Cela étant, le plébiscite offre l’occasion de frapper les conservateurs (dans les deux grands partis) qui ont retenu cette réforme de base depuis si longtemps.

Les sondages ont constamment montré que plus des deux tiers de la population appuient les droits pour le mariage égalitaire. Si ces personnes sont mobilisées, il ne fait aucun doute qu’un vote positif peut être atteint. En fait, si le plébiscite était un exercice de vote régulier, cela aurait été encore plus facile, car cela aurait entraîné une participation beaucoup plus élevée et moins de personnes – en particulier jeunes – se désintéresseraient de la politique.

Plébiscite ou mobilisation ?

Alors que nous publions cet article, certains groupes d’avocats du mariage pour tous poursuivent en justice le plébiscite dans le but de le faire arrêter. À notre avis, leurs efforts feraient mieux de se tourner vers la mobilisation pour le «Oui». Un grand vote pour le «Oui» mettrait le gouvernement sous une énorme pression pour finalement légiférer pour l’égalité d’accès au mariage avant la fin de l’année. Cela permettrait également de faire une déclaration audacieuse à la société que les relations LGBTQI+ sont aussi légitimes que celles des hétérosexuels.

Si les poursuites judiciaires réussissent, cela ne fera que retarder l’affaire, ce qui entraînera encore un autre échec. Pour des raisons similaires, le Parti socialiste s’oppose également à l’idée de boycotter le plébiscite, proposé par certains groupes. Tout d’abord, il serait impossible de mesurer les personnes qui ont boycotté le plébiscite par rapport à ceux qui n’ont pas voté en raison du désintérêt. Plus important encore, un taux d’abstention élevé serait un coup de pouce pour ceux qui s’opposent au mariage pour tous et serait utilisé comme un argument pour écarter indéfiniment la question.

Bien que le plébiscite soit «non contraignant», en ce sens qu’un résultat en faveur du mariage pour tous n’oblige pas formellement le gouvernement à présenter une loi en ce sens. Mais un gouvernement déjà fragile ne voudrait pas risquer de revenir sur sa parole et défier le vote de la population. Cela stimulerait les manifestations publiques et enflammerait davantage les divisions dans les rangs du gouvernement.

Le Socialist Party en Australie comprend les préoccupations de ceux qui s’inquiètent du potentiel d’une campagne de propagande menée par des députés conservateurs et des groupes chrétiens fondamentalistes qui soutiennent le vote du «non». Les arguments contre le mariage pour tous ne sont pas seulement des différences d’opinions, ils causent des dommages réels aux personnes LGBTQI+. Beaucoup de ceux qui s’opposent à l’égalité du mariage insinuent que les personnes LGBTQI+ sont déviantes et qu’on ne peut pas leur confier des enfants. Avec des arguments comme ceux-ci, il ne faut pas être étonné que les jeunes LGBTQI+ soient victimes d’intimidation et qu’ils aient cinq fois plus de chances de se suicider que leurs pairs.

Cela dit, les homophobes ont mené des campagnes préjudiciables contre les personnes LGBTQI+ depuis des années. Le plébiscite donne au moins à ceux qui soutiennent les droits LGBTQI+ la possibilité d’exprimer leur soutien en masse. Ainsi, le référendum victorieux pour l’égalité du mariage en 2015 en Irlande a entraîné un énorme coup de pouce pour le moral de la communauté LGBTQI+ et une diminution des idées homophobes.

Hypocrisie des partis traditionnels

Dans le but d’essayer de se positionner du bon côté de l’histoire, le Labour Australien est devenu un appui d’un vote pour le «Oui» ces dernières semaines. Ce changement est le bienvenu, mais loin d’être sincère. Au pouvoir entre 2007 et 2013, le Labour a refusé de soutenir le mariage égalitaire. De même, ils ont voté en faveur des changements réactionnaires que John Howard a proposés à la loi sur le mariage en 2004.

Bien que le labour indique que si le plébiscite échoue, ils présenteront tout de même une loi visant à réformer la loi sur le mariage s’ils gagnent les prochaines élections, ils refusent par contre de lier leurs députés à un vote consécutif à la politique du parti en faveur du droit matrimonial pour tous. Tout comme pour le Parti libéral, un nid de fondamentalistes de droite qui exerce une influence dans le labour. Ceci ajouté aux positions réactionnaires récurrentes des deux partis traditionnels souligne pourquoi on ne peut faire confiance à aucun des deux partis concernant les droits fondamentaux de tous.

Le chef de file du Labour, Bill Shorten, a suggéré que Turnbull serait le responsable de « tout problème que ce débat entraînerait ». Shorten ne dit cependant rien de l’homophobe « Association des employés de magasinage, distribution et alliés» (SDA) qui est la plus importante union des travailleurs en Australie et qui, depuis des décennies, fait campagne contre les droits égalitaires du mariage ainsi que contre d’autres réformes sociales progressives. Les dirigeants de la SDA et de nombreux membres du labour eux-mêmes sont complices des ‘problèmes’ qui ont été déclenchés suite à ce débat et ils sont aussi responsables que Turnbull.

Le labour a mis en avant la sénatrice Penny Wong, ouvertement gay, pour aider à renforcer leur nouvelle image de supporters de l’égalité entre les sexes et orientations sexuelles, mais ils cachent évidemment le fait que, jusqu’à récemment, Wong elle-même a soutenu la position du Labour contre le mariage homosexuel ! Elle a été qualifiée d’hypocrite par les militants des droits LGBTQI+, mais aujourd’hui, lors d’une tentative opportuniste de dépasser les libéraux, Wong s’est réinventée en tant que championne de la justice sociale. Tous ces politiciens n’ont pas l’air d’avoir honte et espèrent sûrement que les électeurs aient la mémoire courte.

Il ne fait aucun doute que cette question a été utilisée comme ping-pong politique par les grands partis depuis des années. Le potentiel de la réalisation de cette réforme n’a été réalisé que grâce au travail infatigable de milliers de militants qui ont fait campagne et se sont mobilisés depuis plus d’une décennie alors que les grands partis sont constamment changeants, selon l’humeur publique.

Bien que frustrant, cela montre que le véritable changement ne vient pas du parlement, mais lorsque les gens ordinaires se mobilisent. Cette leçon doit être comprise par tous ceux qui se battent pour changer leur vie.

Mettre fin aux discriminations

Une victoire pour l’égalité du mariage pour tous en Australie serait un grand pas en avant, mais malheureusement, il faut noter que cela ne signifierait pas la fin de tous les préjugés contre les LGBTQI+. L’homophobie – tout comme le racisme et le sexisme – est profondément enracinée dans la société et demandera un changement fondamental dans la manière dont la société est organisée pour y mettre fin.

Le capitalisme est un système organisé de telle façon qu’il permet aux grandes entreprises d’amasser des bénéfices. Il perpétue l’inégalité et s’appuie sur la tactique du diviser pour mieux régner pour que les capitalistes maintiennent leur règle. Les bigots de toutes sortes continueront d’exister tant que le capitalisme existera.

Les socialistes s’opposent à l’homophobie sous toutes ses formes, mais en fin de compte, ils font campagne pour toutes les personnes de la classe ouvrière de tous horizons afin de lutter pour une alternative au système capitaliste. Les socialistes se battent pour un système qui utilise la richesse de la société pour la majorité, et non pas pour les quelques-uns. Sur cette base, la solidarité et la coopération humaines seraient encouragées et la bigoterie serait compromise.

Ce type de société socialiste est en contradiction avec les programmes des partis traditionnels qui mettent les intérêts des grandes entreprises avant tout le reste, y compris les droits fondamentaux et le bien-être des personnes LGBTQI+. Un moyen important de renforcer la lutte des LGBTQI+, ainsi que les luttes de toutes les personnes ordinaires, serait de rompre avec ces partis pro-capitalistes et de construire une alternative politique qui représente véritablement les intérêts de ceux que le capitalisme cherche à exploiter et à opprimer.

Le Socialist Party australien est entièrement impliqué dans la campagne pour le «Oui», mais ne veut pas s’arrêter là. Il continuera à se battre pour une société où la libération réelle des personnes LGBTQI+, des travailleurs et des jeunes peut être réalisée. Avec la campagne ROSA nous soutenons cette approche.

Pour le ‘OUI’, mais revendiquons également :

  • Pour des investissements immédiats dans des logements publics suffisants pour éliminer les listes d’attente. Investissons dans des services d’hébergement de crise sécurisés et adaptés aux personnes LGBTQI+. Les jeunes LGBTQI+ sont exposés à un risque disproportionné d’être sans-abri. Nous devons veiller à ce qu’ils aient accès à un logement sécurisé et abordable.
  • Augmentons le salaire minimum et arrêtons la flexibilisation du travail à outrance. L’écart de rémunération entre les personnes LGBTQI+ et les personnes hétérosexuelles est actuellement d’environ 15%, et de nombreux jeunes LGBTQI+ travaillent dans des emplois peu rémunérés et non sécurisés.
  • Contre les coupes budgétaires dans les soins de santé et les assurances maladie et pour investir dans des services de santé sécurisés et accessibles. Pour un refinancement de l’enseignement, défendons et étendons le programme « Safe Education Coalition » dans les écoles en Australie. Beaucoup de jeunes personnes LGBTQI+ ont du mal à accéder à des services de santé sûrs et sans être jugés ou culpabilisés. Les personnes LGBTQI+ sont trois fois plus susceptibles de subir une dépression et les jeunes LGBTQI+ sont cinq fois plus susceptibles de se suicider que la population générale.
  • Construisons un mouvement LGBTQI+ de la base avec les jeunes et les travailleurs de la classe ouvrière dans le but de lutter pour l’égalité du mariage et la fin de toute discrimination. La véritable raison pour laquelle la loi sur l’égalité du mariage a été bloquée c’est qu’aucun des grands partis ne représente les intérêts des gens ordinaires. Ils sont au service des grandes entreprises et leur préoccupation principale est de satisfaire leurs partisans conservateurs. Nous devons construire une nouvelle force politique capable de lutter pour le mariage pour tous, mais aussi une force qui lutte pour une société socialiste où l’égalité est réelle et les droits sont garantis.

Publié en octobre 2015 dans  » The Socialist » (journal du Socialist Party – section soeur du PSL en Australie)


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ROSA organise des actions, des événements et des campagnes pour combattre le sexisme et le système qui l’entretient : le capitalisme.